Trône de ma terre

Le trône de ma terre est une vieille peau répugnante couverte d’abcès crevés, le ventre empli de chants funèbres d’un fourmillement d’âmes maigrelettes aux orbites interminablement creux, les os saillant sur l’épiderme évanescent.

Le trône de ma terre est un fou  feu furieux  incinérant verdure sans censure à l’allure d’un volant bâtiment de guerre.
Le poids de son sceptre ploie tout contrepoids, et l’opposition, mis en apposition, n’a finalement aucune position, sa seule possession, le cadavre en décomposition de l’ambition d’historiques géniteurs d’une nation libre! 
 
Le trône de ma terre est une insatiable courtisane nymphomane, les jambes toujours écartées, les  béants trous barbus constamment exhibés, prêt à copuler pour se maintenir au sommet d’un royaume fantôme que peuplent d’innombrables espoirs longtemps décédés, une colérique jeunesse sénile croulant sous la vieillesse de ses inaudibles suppliques primaires, les pères, les mémoires se remémorant l’aube des pseudos indépendances, ignorance  et crédulité escortant les poupons autant les dirigeants.
 
Le trône de ma terre est ce criminel impénitent qui immole l’âme des populations, ses scrupules en oxydation, ses conseillers en putréfaction, commandant de nocives actions à l’heure des échappées tiers-mondistes.
Ce règne meurtrier n’a pas fini de compter les crânes accrochés à sa ceinture que l’exode volubile témoigne bruyamment aux rots des mers révulsés, livrant le contenu vivant ou mort de leurs entrailles  pour les ventres éventés des gardes-côtes aux lampes aveuglantes, celles-là mêmes qui illuminent les échecs.

Le trône de ma terre, aussi rebutant soit-il, reste immuable à la cime des hypocrisies, or savamment raffiné, sous les youyous et ovations de ses sujets vampirisés.

© Paul Nwesla Biyong
texte déposé - n°444P294

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